Le stage a pour ainsi dire commencé le
vendredi soir avec l’arrivée de Christian Demarre et une demi- douzaine de
judokas venus plus tôt pour ne pas avoir à faire la route le samedi matin. Le
cours du vendredi (18h-20h) de l’école de junomichi de Nantes a été dirigé par
Christian. Le fil rouge de ce cours a été le gonosen no kata.
Une des particularités de l’enseignement
de Christian est, je parle ici en mon nom, un sens aiguë du « transfert » de poids du corps « toujours » vers l’avant.
Le partenaire aura beau être adversaire ou non (consentant ou non… acceptant ou
non), sera « mis en orbite » (selon ses mots) autour de la roue représentée
par le corps. Sa saisie n’est jamais un appui mais est toujours « contraignante »
(manipulation) pour l’autre qui est immédiatement orienté dans un vide
attirant.
Si je devais résumer Christian à
seulement deux qualités du tatami seraient la précision et l’universalité.
Cette dernière qualité qui pourrait paraître un peu pompeuse dans sa forme
brute ici est la meilleure expression que j’ai trouvée pour le moment sans en
être réellement satisfait. Mais je vais tenter de préciser ma penser dans l’explication
de ce compte rendu.
Christian ne pose jamais à priori un
objectif ou un thème de séance. Il laisse la liberté aux stagiaires de faire
eux-mêmes les liens entre les savoir-faire qu’il met à la disposition de chacun
des élèves. Les liens que je fais ici sont donc mon interprétation et ne sont
pas de éléments qui ont été «dites » par l’expérimenté Christian
Le début de chaque demi-journée a débuté
par une proposition de savoir-faire au sol… La première projection au sol est
un renversement où l’autre nous tient en hon gesa gatame. L’orientation du
renversement se fait du côté de l’épaule gauche. Pour ce faire, il s’agit de se
centrer en se rapprochant de l’autre par une rétroversion du bassin la main
vient se hisser le plus loin possible le long du dos de l’autre. Le bras reste
collé au dos. Toute la difficulté réside dans la capacité à garder la même
forme tout le long du renversement. Celui s’effectuant à l’aide des appuis de
pieds qui transmettent toute la force de rotation des deux corps. Cette forme
qui n’est pas conventionnelle au sens où elle n’est ni pas dans le katame no kata
elle reflète la liberté du maitre à l’égard des conventions.
Néanmoins, lorsqu’il s’agit de nous
aider à nous approprier le kime no kata ou le koshikino kata, chaque geste,
chaque intention a son sens. Christian est présent au bon moment pour nous rappeler
les raisons de chaque engagement moteur de chaque mouvement. Christian de
plaisanter que son professeur Igor Corréa l’avait fait répéter lui et ses
camarades 3 années sur le premier mouvement du kata des formes anciennes. La vitesse
lente et l’idée de menace comparable à celle que l’on peut trouver dans le
junokata nous permet de comprendre que la sincérité et l’engagement de pas
synonyme de précipitation. Au contraire, nous accédons à la profondeur de
l’interaction entre les acteurs du koshikinokata. Le poids et la centration
sont omniprésents dans ce kata qui invite à prendre et accepter encore plus
loin l’action de l’autre. Lorsque l’autre s’approche avec son pied droit vers
notre avant et qu’il va saisir notre ceinture à l’avant et à l’arrière, c’est
bien pour nous entrainer vers l’avant de sa hanche droite… Mais à nous de bien
prendre l’action de cette hanche droite avec notre main gauche tout en menaçant
l’autre vers son arrière… Le deuxième mouvement est le prolongement de cette
première idée mais en rendant encore plus de suite dans les idées à l’autre...
Cette relation de mise en tension entre
nous et l’autre est riche d’enseignement car elle permet de nous rappeler que
dans chacun de nos duels, nous n’inventons rien mais nous réapproprions en
permanence les grandes familles de mouvements et enchainements prescrit
plusieurs décennies avant nous. L’histoire et les formes d’enchainement
montrent leur pertinence à chaque fois en rappelant leur logique essentielle en
traversant les siècles.
En plus de voyager dans le temps, nous
voyageons à chaque fois dans l’espace en
nous approprions une attitude asiatique. Au lieu de nous serrer la main comme
pour rassurer notre interlocuteur de notre intimité réciproque, le salut
japonais montre le respect de l’autre tout en maintenant la distance. Par
contre, lorsque nous nous tenons, c’est une acceptation totale de l’autre.
L’autre n’est plus extérieur de moi mais à l’intérieur d’un couple au sein
duquel il s’agit de jouer à « satelliser » l’autre avant lui.
Cette complicité qui se créé lors du jeu
sur le tatami a été prolongée par 3 repas pris avec tous ceux qui ont pris le
temps de rester le soir et le repas du midi pris dans un restaurant qui
s’appelle les Pirates. A part le petit couac du midi qui n’a pas permis au
gérant du restaurant de nous offrir le menu négocié parce qu’il n’avait pas
compris le détail de la commande. Asami et Quy ont brillamment organisé les
deux repas du soir à bases de spécialités à la fois vietnamiennes et japonaises
qui ont été pris chez Emmanuel.
25 personnes ont été présentes le samedi
22 le dimanche pour partager ces bons moments de rencontre par le judogi. Je ne
déplorerai juste qu’il n’y a pas eu assez de personnes non initiées au
junomichi. Je félicite néanmoins les moins gradés qui ont su être réguliers
malgré les maladies qui guettaient certains !... A très vite pour le
prochain stage.
Ps : Nous attendons tous de pouvoir
admirer en photo la silhouette de « tonton Marc » « jeune »
dont il a pu faire les éloges lors d’un des repas. Le blog acceptera de se
faire le relais du bel homme !
Nantes, le 10
Octobre 2014
Emmanuel
Gourmelin
Professeur de
junomichi
Diplômé d’Etat
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire